Projet de réaménagement de la Toison d’Or : l’enquête publique a été tronquée, elle doit être recommencée

Projet de réaménagement de la Toison d’Or : l’enquête publique a été tronquée, elle doit être recommencée

Les documents de la demande de permis n’ont été mis en ligne que 7 jours après le début de l’enquête publique. Cette entrave à la participation est inacceptable !

La participation des citoyens dans le processus de définition, d’élaboration et de critique des projets est fondamentale (qui plus est quand ils concernent des espaces publics et qu’ils sont donc développés par les pouvoirs publics).
L’ARAU a toujours combattu, et continue de combattre, pour que quiconque puisse exprimer son avis sur ces projets, que ce soit pour les contester, demander qu’ils soient amendés, ou les soutenir. Pour garantir ce droit, la procédure de publicité-concertation (ou mesures particulières de publicité : enquête publique et commission de concertation) doit être organisée de manière irréprochable : c’est le moins qu’on puisse attendre d’une Région démocratique respectant l’État de droit.

L’enquête publique sur la demande de permis pour le réaménagement de l’avenue de la Toison d’Or et du boulevard de Waterloo n’a pas respecté la procédure

Depuis l’entrée en vigueur, le 1er septembre 2019, de l’arrêté relatif aux enquêtes publiques, les documents des demandes de permis soumis aux mesures particulières de publicité doivent être mis en ligne sur la plateforme régionale openpermits.brussels et y être « consultables par toute personne durant l’enquête publique». C’est au demandeur du permis (dans ce cas-ci Bruxelles Mobilité) qu’il incombe de charger les documents sur cette plateforme.
L’avis d’enquête publique, publié sur le site de la Ville de Bruxelles (qui organise l’enquête et la commission de concertation) et affiché dans l’espace public, précise que « Pendant toute la durée de l’enquête publique, le dossier est consultable en ligne : http://openpermits.brussels/ »
Or, les documents de la demande de permis n’ont été mis en ligne que 7 jours après le début de l’enquête publique… Et il a fallu pour cela que l’ARAU alerte la presse !

Le 28 janvier (2e jour de l’enquête organisée du 27 janvier au 25 février), l’ARAU contacte l’administration régionale de l’urbanisme pour signaler l’absence des documents sur le site de la Région. Comme on peut le voir ci-dessous sur la capture d’écran du courriel envoyé, le non respect de la procédure ne concernait pas que le dossier Toison d’Or. C’est d’ailleurs loin d’être la première fois que l’ARAU est confronté à cette situation, également rencontrée et signalée à de nombreuses reprises, notamment par Inter-Environnement Bruxelles et Wolu-Inter-Quartiers mais aussi par des habitants.

Les 2 autres dossiers mentionnées dans ce courriel sont une demande de permis rue De Pascale 43-49 et une demande de permis pour le réaménagement des espaces publics de la rue du Marché au Charbon. Les documents relatifs à cette dernière, introduite par la Ville de Bruxelles (!), ont été publiés encore plus tardivement que pour le dossier Toison d’Or…

Le 1er février, l’administration n’a toujours pas répondu (nous n’avons, à ce jour, reçu qu’un simple accusé de réception). L’ARAU décide donc d’alerter la presse via un communiqué : Projet de réaménagement de la Toison d’Or : les documents ne sont toujours pas en ligne !

Un journaliste de La Capitale s’empare du sujet : il prend contact avec le cabinet de la ministre de la mobilité Elke Van den Brandt et avec le cabinet de l’échevine de l’urbanisme de la Ville de Bruxelles Ans Persoons. Suite à ses démarches et à la publication de son article le 2 février, les documents sont finalement mis en ligne sur le site de la Région…
En revanche, la Ville de Bruxelles refuse de prolonger ou de reporter l’enquête publique, se retranchant derrière le fait que c’est la responsabilité du demandeur, Bruxelles Mobilité, de charger les documents sur openpermits : « le cabinet de l’échevine Ans Persoons (one.brussels) a précisé : « l’enquête publique ne sera pas prolongée. C’est au demandeur à assumer le fait qu’il doit publier les documents. »»

Bref, on se retrouve dans une situation où l’administration régionale de l’urbanisme, et le secrétaire d’État Pascal Smet, restent muets, où la Ville de Bruxelles, et l’échevine Ans Persoons, s’en lavent les mains et où l’administration régionale de la mobilité, et la ministre Elke Van den Brandt, n’envisagent nullement de reporter l’enquête alors qu’elles en ont la possibilité.

Sans mise à disposition de l’information, la participation est un vain mot

Dans l’accord de majorité régional, on peut lire que le gouvernement « recentrera les opérateurs publics du développement urbain sur leur cœur de mission afin de renforcer leurs spécificités et leur expertise, de permettre de véritables synergies et d’offrir une meilleure lisibilité, efficacité et cohérence de l’action publique vis-à-vis du citoyen et du secteur privé. »

Comment parler de « lisibilité de l’action publique vis-à-vis du citoyen » sans mise à disposition correcte de l’information ? Comment prétendre défendre et vouloir renforcer la participation (ce qui est le cas, sauf erreur, de tous les partis politiques) et, dans le même temps, ne pas appliquer les « minima légaux » en vigueur ?

L’ARAU plaide pour le renforcement, l’élargissement et l’amélioration de la participation : même si nous jugeons le cadre actuel insuffisant et non exempt de défauts, la moindre des choses est que les pouvoirs publics le respectent et l’appliquent !

Pour en revenir au cas du projet de réaménagement de la Toison d’Or, l’absence de mise à disposition des documents pendant près d’un quart de la durée de l’enquête publique signifie, concrètement, que les associations ne peuvent pas faire leur travail correctement. Pour les « simples citoyens », c’est encore pire : confrontés à des centaines de pages de dossiers, parfois très techniques, émettre un avis ou des remarques dans le délai de 30 jours d’enquête s’avère déjà compliqué. Si ce délai est réduit à 23 jours, la tâche tient de l’impossible.

Conclusion : l’enquête publique doit être recommencée

L’ARAU demande à la commission de concertation (dont la date de réunion n’a pas encore été communiquée) de ne pas rendre d’avis sur la demande de permis pour le réaménagement de l’avenue de la Toison d’Or et du boulevard de Waterloo. Elle doit recommander de réorganiser l’enquête publique afin qu’elle puisse se dérouler conformément à la réglementation et que quiconque puisse prendre connaissance de tous les éléments du projet (plans, rapport d’incidences et autres documents) et formuler un avis en bénéficiant pour cela du délai légal de 30 jours.

Le cas du projet Toison d’Or, n’est pas un cas isolé. De trop nombreuse demandes de permis ne respectent pas l’obligation de publication des documents sur la plateforme régionale openpermits. Cette disposition est en vigueur depuis près d’un an et demi, il n’y a donc aucune « excuse » pouvant justifier sa non application. L’ARAU demande que l’administration régionale de l’urbanisme vérifie systématiquement que tous les documents soient bien chargés sur openpermits dès le 1er jour d’enquête publique. Pour terminer, il faut signaler que ce type de manquement ouvre la voie à de solides recours au Conseil d’État contre les permis qui viendraient à être délivrés sur base d’enquêtes publiques entachées d’irrégularités de procédure.