Encore une demande de démolition sans justification ! Il est temps d’en finir avec ces pratiques d’un autre temps

Encore une demande de démolition sans justification ! Il est temps d’en finir avec ces pratiques d’un autre temps

Le promoteur Atenor demande la démolition d’un immeuble de bureaux rue de la Loi 93-97 sans apporter aucune justification, ni analyse, ni bilan carbone à ce choix. Une pratique inacceptable : la rénovation doit devenir la règle, conformément aux engagements de la Région et à la « vision partagée » pour le Quartier Européen.

Ce mercredi 1er février, la commission de concertation se penchera sur une demande de permis de démolition de l’immeuble de bureaux situé 93-97 rue de la Loi. Cette parcelle fait partie d’un plus vaste ensemble (voir illustration ci-dessous) où le promoteur Atenor développe un projet depuis plusieurs années. Ce projet, aujourd’hui nommé « Realex », a connu un développement pour le moins « heurté » entre tentatives de la Région de modifier la réglementation urbanistique dans le quartier de la rue de la Loi (Règlement Régional d’Urbanisme Zoné adopté puis annulé par le Conseil d’Etat ; projet de Plan d’Aménagement Directeur finalement abandonné) et multiples demandes et délivrances de permis, elles aussi objets de recours. Le projet actuel, dont la demande de permis est à l’instruction, consiste en la « construction d’un immeuble de bureaux (20.208 m²) accueillant également des surfaces commerciales (763 m²) et d’un Centre de Conférences destiné à la Commission européenne (26.207 m²), la transformation d’un hôtel de maître réaffecté à de l’équipement d’intérêt collectif (904 m²) » (note explicative, p.4). Mais la demande de permis qui sera examinée ce 1er février ne concerne que la démolition de l’immeuble de bureaux situé 93-97 rue de la Loi : il s’agit donc, en quelque sorte, et comme l’indique la note explicative (p. 5), de « réaliser de manière anticipative ces travaux de démolition ».

Pourquoi cette demande « anticipative » de démolition ?

La demande de démolition aurait très bien pu faire partie de la demande globale de permis pour le projet de construction « Realex », comme cela se fait dans la très grande majorité des cas. Pourquoi Atenor a-t-il décidé de procéder autrement en demandant un permis de démolition ? Plusieurs raisons peuvent expliquer ce choix :

  • La volonté de gagner du temps : si Atenor est déjà autorisé à démolir les immeubles 93-97, la durée de chantier de construction de « Realex » pourrait être réduite ;
  • La volonté de gagner de l’argent : tant que l’immeuble est debout, des taxes sont dues (taxe sur les surfaces non résidentielles, taxes sur les bureaux…) ;
  • La volonté d’éviter de devoir justifier et faire analyser une opération de démolition-reconstruction, opération qui aurait toutes les chances d’être refusée par la Région.

« Favoriser au maximum le maintien des bâtiments existants et leur rénovation »

Cet objectif figure noir sur blanc dans la « Vision partagée », un document, publié par l’administration régionale de la planification, qui doit servir de guide pour la transformation du Quartier Européen. Ce texte précise que :

 

il est nécessaire de stimuler la rénovation du bâti existant conformément à la stratégie « Renolution » et de réduire les opérations de démolition/reconstruction qui représentent encore 2/5 des permis d’urbanisme délivrés entre 2008 et 2021. Il s’agit de diminuer drastiquement le bilan carbone des opérations urbaines

La volonté de la Région de privilégier les rénovations aux démolitions-reconstructions ne se limite pas au Quartier Européen : il s’agit d’une « ligne directrice » qui doit s’appliquer à tout le territoire (la préservation et la rénovation des constructions existantes figure d’ailleurs dans le projet de modification du Règlement Régional d’Urbanisme).

D’après le secrétaire d’Etat en charge de l’urbanisme, Pascal Smet, « Une démolition ne doit être entreprise que lorsqu’il n’y a vraiment plus aucune autre option ». La directrice de l’administration régionale de l’urbanisme, Betty Waknine, précise qu’il s’agit pour les promoteurs de « justifier toute démolition via une analyse multicritères ». Or, le dossier de demande de démolition n’apporte aucune justification quant à l’impossibilité de maintenir l’immeuble du 93-97 dans le projet « Realex ». En toute logique, la demande de démolition devrait donc être refusée. Mais un récent précédent laisse penser qu’il pourrait en être autrement. Il y a quelques mois, un permis a en effet été délivré pour la démolition du CCN (le Centre de Communication Nord, accolé à la gare du Nord) : il s’agissait là aussi d’une demande « anticipative » de la part d’Atenor qui a obtenu ce permis sans avoir eu à justifier la pertinence de la démolition…

En finir avec les permis de démolition !

La demande du secteur associatif, exprimée depuis de nombreuses années, de faire de la rénovation la règle et de la démolition-reconstruction l’exception semble avoir (enfin) percolé au niveau des discours politiques. « Sur le terrain », force est de constater que des démolitions sont encore autorisées sans qu’elles ne soient justifiées. Pour l’ARAU, de telles pratiques sont inacceptables : toute demande de démolition doit être scrupuleusement analysée et faire l’objet d’un bilan carbone. Celui-ci ne peut être correctement réalisé qu’en comparant l’option de la rénovation à celle de la démolition-reconstruction, ce qui ne peut bien sûr pas être fait dans le cadre d’une demande de permis portant uniquement sur une démolition. Ce type de demande devrait tout simplement ne plus être autorisé.

En conclusion, l’ARAU demande à la commission de concertation de rendre un avis défavorable à cette demande de permis de démolition.