Rue Neuve 80-82 : rien ne justifie la démolition de 3000 m² en parfait état

Rue Neuve 80-82 : rien ne justifie la démolition de 3000 m² en parfait état

La Région doit systématiquement produire et communiquer les données concernant le coût environnemental des projets de démolition-reconstruction. Ce type d’opération va à l’encontre de ses objectifs environnementaux. La commission de concertation doit remettre un avis négatif et exiger, ici comme ailleurs, une rénovation à partir du bâti existant.

Ce mercredi 7 octobre, la commission de concertation se réunira pour examiner une demande de permis pour la démolition-reconstruction d’un ensemble de bâtiments situés rue Neuve 80-82. Situés à l’angle de la rue du Pont Neuf, ces immeubles accueillent des surfaces commerciales sur un peu plus de 2500 m² (magasins « H&M » et « Du pareil au même ») et 387 m² de logements.

Le projet consiste en la démolition de la quasi totalité de cet ensemble, à l’exception des façades des maisons situées au 80A et au 82, pour reconstruire à peu près la même chose en termes de fonctions (en ajoutant quelques mètres carrés de logements et de bureaux).
Le seul argument avancé pour justifier la démolition est d’ordre purement commercial. En d’autres termes, le demandeur du permis veut augmenter ses revenus locatifs en mettant sur le marché des surfaces commerciales plus « vendeuses » et, « accessoirement », augmenter les superficies de logements et de bureaux pour retirer d’autres bénéfices supplémentaires. Il s’agit là d’un pur calcul économique, qui ne tient absolument pas compte de l’impact environnemental d’une telle opération de démolition-reconstruction.

 

L’impact environnemental de la démolition-reconstruction : une considération absente du dossier de demande de permis

Les opérations de démolition-reconstruction sont extrêmement dommageables pour l’environnement : outre le gaspillage des matériaux existants, elles génèrent d’énormes quantités de CO2 pour la production, l’acheminement et la mise en œuvre de matériaux neufs. Une construction neuve sera certes moins énergivore que le bâti plus ancien mais il faut aussi tenir compte, dans un calcul global, de la quantité d’énergie (et donc de CO2) dépensée pour une démolition-reconstruction. Le dossier de demande de permis ne contient aucun bilan de ce type. Il faut en outre souligner que le projet n’apporte aucune plus-value d’intérêt général par rapport à la situation existante (pas de production de logements sociaux, pas de création d’équipements publics, augmentation de la superficie de bureaux dans une zone déjà saturée).
L’ARAU demande à la commission de concertation de rendre un avis négatif sur la demande de permis.

La prise de conscience de l’impact environnemental négatif des opérations de démolition-reconstruction existe, tant chez les professionnels de l’immobilier que chez les représentants politiques et dans l’administration. Là où le bât blesse, comme bien souvent, c’est dans la traduction de ces intentions en une ligne de conduite politique et en mesures réglementaires claires et fermes… et dans l’analyse des dossiers.

La première étape indispensable est la création par la Région d’un outil de calcul du bilan environnemental/énergétique des opérations de démolition-reconstruction. Il incombe à l’administration (Bruxelles Environnement) de le développer.
Deuxièmement, il faut, bien évidemment, utiliser systématiquement cet outil dès qu’une demande de permis concerne une opération de démolition-reconstruction. Le recours à cet outil doit figurer noir sur blanc dans les cahiers des charges des rapports et études d’incidences. Le demandeur doit, dès le premier contact avec l’administration, être mis au courant de la volonté des autorités d’éviter les opérations de démolition pure et simple.

 

Faire de la conservation la règle et de la démolition l’exception

L’urgence climatique et l’épuisement des ressources non renouvelables nous imposent de changer de mentalité. Détruire des bâtiments sous le seul prétexte qu’ils ne correspondraient plus aux « attentes du marché » est injustifiable et inacceptable. Le cas exposé dans cette analyse ne peut pas faire débat : la demande de permis doit être refusée.

De manière générale, la conservation-rénovation doit devenir la règle et la démolition-reconstruction l’exception. Les programmes des projets doivent s’adapter au bâti existant, pas l’inverse ! On voit trop souvent les promoteurs considérer les bâtiments existants comme négligeables (car déjà financièrement amortis) et débarquer avec des projets conçus comme s’ils s’implantaient sur des terrains vierges avec, bien sûr, la rentabilité pour seul objectif.
La Région doit envoyer un message clair et ferme : les projets conçus de la sorte ne sont plus acceptables.