Arrêter de cacher la poussière sous le tapis

Arrêter de cacher la poussière sous le tapis

[Article paru dans la revue Bruxelles en Mouvement, Mobilités à deux vitesses, le 6/12/2022]

La voiture nuit à la ville et à ses habitants, notamment par son stationnement en voirie qui accapare de l’espace public précieux, empêchant son utilisation à d’autres fins : déplacements piétons et cyclistes sécurisés et confortables, verdurisation, fonctions de « séjour »… Selon certains discours simplistes, reporter le stationnement en-dehors de la voirie suffirait dès lors à régler ces problèmes. C’est oublier que, même « loin des yeux », les parkings continuent à dégrader l’habitabilité de la ville.

La réglementation du stationnement (nombre d’emplacements, tarifs…) est un levier incontournable des politiques de mobilité. La disponibilité de places de parking est en effet un incitant majeur à l’utilisation de la voiture : c’est le deuxième facteur le plus déterminant (après la possession d’un véhicule) dans le choix de ce mode de déplacement . Autrement dit, plus l’offre de stationnement est importante, plus elle « génère » de trafic automobile. Qu’elle soit située en voirie ou hors voirie, une place de parking reste une place de parking : « compenser » la suppression du stationnement dans l’espace public par la création d’emplacements dans des parkings souterrains n’aurait donc qu’un effet limité sur le trafic « généré » . Si l’on veut diminuer le volume du trafic automobile, il faut diminuer le nombre global (voirie et hors voirie) de places de parking et donc commencer par arrêter d’en créer de nouvelles…

Les dégâts causés par la voiture sur la ville sont connus : graves atteintes à la santé des habitants par la pollution, le bruit et le stress, accaparement de l’espace public, dégradation de la mobilité, émissions massives de CO2… Rendre les voitures plus « propres » en les électrifiant ou les soustraire aux regards en les stationnant « loin des yeux » ne sont que des manières de déplacer les problèmes et/ou d’en créer des nouveaux. « Stocker la ferraille » en-dehors des rues, places et avenues est certes « moins pire » que voir de longues enfilades de voitures le long des trottoirs. Mais ce n’est pas sans conséquences : le stationnement hors voirie a d’importants coûts sociaux et environnementaux. Il empêche en outre de consacrer une part non négligeable de foncier, rare et précieux, à des usages qui rencontrent bien plus les intérêts des habitants : logements abordables, espaces verts, équipements collectifs…

La Région s’est récemment lancée dans une vaste révision de ses outils urbanistiques (PRAS, RRU, CoBAT…) : l’occasion d’arrêter de vouloir de cacher la poussière sous le tapis et d’établir une vision tournée vers l’avenir de la politique de stationnement.